Conspirationnisme - Les Théories de la Conspiration

du complot. C’est ce qu’avait très bien vu d’ailleurs Raoul Girardet dans un livre fondateur qui s’appelle «Mythes et Mythologies Politiques » où il consacre une des quatre grosses parties de son livre aux mythes de la conspiration. Donc c’est quand même un thème qui a été traité par l’instance politique, par la réflexion, par la philosophie politique, par des auteurs comme Karl Popper, par exemple, par Hannah Arendt, par l’historien Léon Poliakov et plus récemment je pense à Pierre-André Taguieff, qui a consacré une somme au sujet qui s’appelle « La Foire aux Illuminés ». Donc voilà, je crois que c’est un sujet incontournable en fait maintenant ; on en entend parler assez souvent, c’est récurrent dans les médias. Tous les 11 septembre, à chaque anniversaire des attentats du 11 septembre 2001, on a ce thème récurrent qui revient : est-ce qu’il s’agit d’un complot ou pas, ça fait débattre beaucoup de gens. Ça donne lieu à des foires d’empoigne assez houleuses d’ailleurs, chacun se traitant de négationniste, de révisionniste. Je crois qu’il ne faut pas aborder le sujet de cette manière-là, c’est-à-dire que voilà le mot négationniste c’est très grave. Je ne crois pas que les conspirationnistes soient des négationnistes. Je ne crois pas qu’ils soient antisémites comme on dit ; simplement lorsqu’ils professent des théories du complot juif par exemple, oui, on peut dire qu’ils sont antisémites ; ou lorsqu’ils s’acoquinent avec des gens d’extrême droite raciste. Il y a aussi une théorie du complot musulman, ce n’est pas réservé aux antisémites. Mais voilà, je crois qu’on peut essayer d’alerter et d’être vigilant sur ce thème-là, sans vouloir faire des procès d’intention, de chasse aux sorcières ou toutes ces choses-là. Dans l’esprit, ce qu’on appelle le conspirationnisme n’est pas une idéologie. Je crois qu’il faut vraiment le prendre comme un discours, un mode de discours qui peut se mettre au service d’idéologies diamétralement opposées et très différentes. Simplement, les ressorts sont toujours les mêmes, c’est-à-dire qu’on va inverser ce qu’on appelle la charge de la preuve. Inverser la charge de la preuve, ça consiste à dire : « je n’ai pas à prouver ce que j’avance, c’est à vous de me prouver que j’ai tort ». Le discours conspirationniste, c’est un discours, comment dire, qui rejette l’idée qu’il puisse y avoir des coïncidences, qui explique qu’il n’y a pas de hasard, que tout est lié, qu’il n’y a pas de fumée sans feu et que dans tout ce qui arrive dans l’histoire, dans tout ce qui surgit dans l’histoire, dans tous les événements, il y a quelque chose de pensé, d’intentionnel et que voilà les logiques intentionnelles sont à l’œuvre, de manière souterraine, de manière secrète, et que l’enjeu (c’est ce que j’ai dit un petit peu au début, je me répète), c’est de dévoiler, de faire la lumière sur ces logiques qu’on ne voit pas au premier coup d’œil et qui sont les plus importantes. Moi je pense au contraire qu’on s’égare et qu’il y a des complots évidemment dans l’histoire, ça existe, ça fait partie de la vie politique, mais tout n’est pas complot.

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